« L a Russie, l’un des foyers majeurs de la diaspora arménienne, azérie & géorgienne » ….: OTC

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NAM (Nouvelles d'Arménie)

9 août 2025

Krikor Amirzayan

 

https://www.armenews.com/le-texte-complet-de-laccord-signe-hier-a-washington-entre-pachinian-aliev-et-trump/

Le texte complet de l’accord signé hier à Washington entre Pachinian, Aliev et Trump

Le texte signé hier à la Maison Blanche entre le Premier ministre arménien Nikol Pachinian, le président azerbaïdjanais Ilham Aliev et le président américain Donald Trump est le suivant :

Déclaration conjointe du Président de la République d’Azerbaïdjan et du Premier ministre de la République d’Arménie sur les résultats de leur rencontre à Washington D.C., États-Unis d’Amérique

Nous, le Président de la République d’Azerbaïdjan et le Premier ministre de la République d’Arménie, réunis à Washington D.C., États-Unis d’Amérique, le 8 août 2025, déclarons ce qui suit :

  1. Nous, ainsi que le Président Donald J. Trump des États-Unis d’Amérique, avons assisté à la paraphe du texte convenu de l’Accord sur l’établissement de la paix et des relations interétatiques entre la République d’Azerbaïdjan et la République d’Arménie par les ministres des Affaires étrangères des Parties. À cet égard, nous reconnaissons la nécessité de poursuivre les actions afin d’aboutir à la signature et à la ratification finale de l’Accord, et nous soulignons l’importance de maintenir et de renforcer la paix entre nos deux pays.
  2. Nous avons également assisté à la signature de l’appel conjoint à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) concernant la clôture du processus de Minsk de l’OSCE et des structures connexes par les ministres des Affaires étrangères de la République d’Arménie et de la République d’Azerbaïdjan. Nous appelons tous les États participants de l’OSCE à adopter cette décision.
  3. Nous réaffirmons l’importance de l’ouverture des communications entre les deux pays pour le transport intra-étatique, bilatéral et international, afin de promouvoir la paix, la stabilité et la prospérité dans la région et au-delà, sur la base du respect des frontières et de l’intégrité territoriale. Ces efforts incluent une connectivité sans entrave entre la partie principale de la République d’Azerbaïdjan et la République autonome du Nakhitchevan via le territoire de la République d’Arménie, avec des avantages réciproques pour la connectivité internationale et intra-étatique de la République d’Arménie.
  4. La République d’Arménie travaillera avec les États-Unis d’Amérique et des tiers déterminés d’un commun accord afin d’établir un cadre pour le projet de connectivité « Route Trump pour la Paix et la Prospérité internationale » (TRIPP) sur le territoire de la République d’Arménie. Nous confirmons notre détermination à œuvrer de bonne foi pour atteindre cet objectif dans les plus brefs délais.
  5. Nous reconnaissons la nécessité de tracer la voie vers un avenir radieux, non lié aux conflits du passé, conformément à la Charte des Nations Unies et à la Déclaration d’Alma-Ata de 1991. Les conditions sont désormais réunies pour que nos nations s’engagent enfin dans des relations de bon voisinage fondées sur l’inviolabilité des frontières internationales et l’interdiction absolue du recours à la force pour acquérir un territoire après un conflit ayant causé d’immenses souffrances humaines. Cette réalité, qui n’est pas et ne devrait jamais être sujette à révision, ouvre la voie à la fermeture du chapitre de l’inimitié entre nos deux nations. Nous rejetons fermement et excluons toute tentative de vengeance, maintenant et à l’avenir.
  6. Nous exprimons notre confiance que ce Sommet constitue une base solide pour le respect mutuel et le progrès de la paix dans la région.
  7. Nous exprimons notre profonde gratitude au Président Donald J. Trump des États-Unis d’Amérique pour son accueil chaleureux lors de ce sommet important et pour ses contributions significatives à l’avancement de la normalisation des relations bilatérales entre la République d’Azerbaïdjan et la République d’Arménie.

La présente Déclaration a été signée le 8 août 2025 à Washington D.C., États-Unis d’Amérique.

Signé :

Ilham ALIYEV

Président de la République d’Azerbaïdjan

Nikol PASHINYAN

Premier ministre de la République d’Arménie

Témoin :

Donald J. TRUMP

Krikor Amirzayan

 

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CERCLE D'AMITIÉ FRANCE-ARMÉNIE

12 août 2025

https://france-artsakh.fr/2025/08/12/lartsakh-le-haut-karabagh-le-grand-absent-de-la-declaration-de-washington/

L’Artsakh (le Haut-Karabagh) : le grand absent de la Déclaration de Washington

Communiqué de presse

Le vendredi 8 août, l’Arménie et l’Azerbaïdjan ont signé à Washington une déclaration d’intention d’un accord de paix présentée comme historique. Mais derrière l’apparente volonté de stabiliser le Caucase du Sud, ce texte laisse de côté des questions essentielles, compromettant ainsi les perspectives d’une paix juste et durable.

Le Cercle salue la volonté affichée par les autorités arméniennes de parvenir à un accord de paix, démarche qui témoigne d’une aspiration sincère à ouvrir une nouvelle ère pour la région. Le Cercle exprime, cependant, son regret que la déclaration n’évoque ni le droit au retour des réfugiés arméniens du Haut-Karabagh, victimes du nettoyage ethnique mené par l’Azerbaïdjan en septembre 2023, ni la libération des prisonniers de guerre arméniens toujours détenus à Bakou. Elle reste également silencieuse sur la protection du patrimoine culturel arménien en Artsakh, aujourd’hui gravement menacé de destruction ou d’appropriation.

Autre point alarmant : la demande conjointe des ministres arménien et azerbaïdjanais adressée à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) concernant « la dissolution du processus du Groupe de Minsk de l’OSCE et des mécanismes connexes ». Même si la structure est inopérante depuis cinq ans, cette initiative, si elle est acceptée, privera définitivement la communauté internationale d’un cadre multilatéral pour résoudre les questions non réglées du conflit du Karabagh.

La déclaration prévoit également la mise en œuvre, sur le territoire arménien, de la « Route Trump pour la paix et la prospérité internationales », incluant « une communication sans entrave entre la partie principale de la République d’Azerbaïdjan et la République autonome du Nakhitchevan à travers le territoire de la République d’Arménie ». De fait, ce corridor reliera l’Azerbaïdjan à la Turquie et renforcera nécessairement la position stratégique de ces deux Etats dans la région. Le Cercle exprime ses vives inquiétudes face au risque d’un déséquilibre accru des forces, déjà défavorable à l’Arménie.

« L’Histoire de notre vieux continent européen nous rappelle qu’une paix à tout prix n’est pas le meilleur garant d’une paix durable, et que l’illusion selon laquelle satisfaire l’agresseur calmerait nécessairement ses appétits a été démentie à maintes reprises. Si nous acceptons cette vérité dans le contexte du conflit russo-ukrainien, nous devons aussi admettre qu’elle s’applique pleinement au conflit du Karabagh — grand absent de la déclaration d’intention pour la paix » — a indiqué François Pupponi, Président du Cercle d’Amitié France-Artsakh.

Contact presse : secretariat@france-artsakh.fr

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NAM (Nouvelles d'Arménie)

12 août 2025

Garo Ulubeyan

La diplomatie arménienne à la manœuvre en Iran après l’accord arméno-azéri sous l’égide de Trump

A l’issue même de la rencontre des dirigeants arménien Nikol Pachinian et azerbaïdjanais Ilham Aliev le 8 août à la Maison Blanche sous l’égide du président américain Donald Trump qui a donné lieu à un accord de principe en vue d’une paix durable entre les deux pays ennemis du Sud Caucase, les autorités arméniennes se sont empressées d’informer les pays voisins de la teneur des discussions et des arrangements conclus, singulièrement sur le point le plus controversé, ce « corridor du Zanguezour » qu’Aliev réclame avec insistance depuis sa victoire militaire sur les Arméniens au Karabakh en novembre 2020 et qui devrait prendre forme sous les auspices des Etats-unis, auxquels l’Arménie confie la sous-traitance de cet axe stratégique censé relier l’Azerbaïdjan à son enclave du Nakhitchevan et au-delà à la Turquie, via la province méridionale arménienne du Syounik, frontalière de l’Iran.

Si la discussion qu’a eue Pachinian au téléphone avec Recep Tayyip Erdogan relevait d’une simple formalité, le président turc se félicitant ouvertement, comme d’ailleurs ses partenaires occidentaux de l’Otan, d’un accord qu’il avait annoncé imminent, peu après avoir reçu le dirigeant arménien à Ankara le 20 juin, il lui fallait rassurer la Russie et surtout l’Iran qui, jusqu’à la dernière minute, a exprimé son opposition à ce corridor extraterritorial qui menace l’existence même de la frontière arméno-iranienne et ouvre la voie aux Occidentaux, à commencer par les Etats-unis, dans le Sud Caucase. Il semble toutefois qu’en l’état, les arrangements passés à Washington, dont Pachinian a soutenu qu’ils respectaient la souveraineté de l’Arménie, ce dont doute d’ailleurs fortement son opposition, sont accueillis avec un certain soulagement tant à Moscou qu’à Téhéran.

Dans les deux capitales, on se félicite de l’avancée du processus de paix entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, tout en cherchant à minimiser la portée de la présence américaine. Ainsi la Russie, qui a en vue la rencontre annoncée pour le 15 août entre Poutine et Trump en Alaska, où l’Ukraine devrait être à l’ordre du jour prioritaire, s’est gardée de trop critiquer le texte et a affirmé que les termes de l’accord de cessez-le-feu négocié par Poutine qui avait mis fin le 9 novembre 2020 à la guerre du Karabakh, étaient encore valides ; il s’agit pour la Russie de ne pas paraître évincée de la région où selon les termes de cet accord, il lui revenait d’administrer le trafic sur le dit « corridor du Zanguezour ». L’Iran lui aussi s’est montré satisfait par la tournure des discussions à Washington, en déclarant aussitôt que le corridor tel qu’il était présenté, c’est-à-dire non assorti de présence militaire américaine, ne constituait pas une menace directe.

Mais pour dissiper les inquiétudes persistantes de l’Iran, la diplomatie arménienne sait pertinemment qu’il lui faut présenter davantage de garanties. Ainsi, de hauts diplomates de l’Iran et de l’Arménie devaient avoir des discussions mardi 12 août, une rencontre censée conforter la République islamique dans son statut de puissance majeure dans cette région du Sud Caucase dont elle craint d’être évincée, alors qu’elle a déjà été durement affaiblie dans ses aspirations au leadership au Moyen-Orient par les coups qu’Israël lui a portés, ainsi qu’à ses alliés chiites au Liban comme en Syrie. Pour Téhéran, le maintien de cette influence au Sud Caucase va de pair avec sa volonté de contrer les efforts de l’Occident visant à changer l’architecture de la sécurité dans la région.

Dépêché à Téhéran par son gouvernement, le vice-ministre arménien des affaires étrangères doit discuter de questions liées à la stabilité régionale, au processus de paix arméno–azerbaïdjanais et aux projets d’infrastructure susceptibles de modifier l’équilibre des forces dans l’espace post-soviétique. A Téhéran, les responsables iraniens ont inscrit cette rencontre dans le cadre d’un “ dialogue stratégique sur le long-terme ”, en refusant de la désigner comme une manœuvre diplomatique improvisée. Esmail Baghaei, porte-parole du ministère iranien des affaires étrangères, a indiqué pour sa part que la rencontre porterait sur des « questions d’intérêt  mutuel ” et a réaffirmé l’opposition de l’Iran à tout contrôle étranger sur des routes de  transit maillant la région. Téhéran a régulièrement critiqué l’implication des Etats-unis et de l’Otan dans le Caucase, en faisant valoir que cette interférence externe saperait la souveraineté des pays de la région et risquait d’attiser les tensions.

Les analystes font remarquer que cette rencontre intervient à un moment critique dans le processus de paix arméno–azéri, alors que Washington et Bruxelles intensifient des efforts de médiation que l’Iran tient pour un défi direct à son influence. Pour Erevan, le renforcement des relations avec Téhéran présente l’avantage de faire contre-poids aux pressions turco-azéries et d’être un garde-fou potentiel contre l’isolement géopolitique. Selon Mehr News, le vice-ministre arménien des affaires étrangères doit se rendre à Téhéran pour des consultations, qui doivent porter sur les derniers développements dans le régime de cessez-le-feu, la coopération économique et l’opposition à des corridors de transport imposés par des puissances tierces. L’agence de presse souligne que pour les responsables iraniens, ces discussions constituent un tournant sans les efforts de paix régionaux.

 

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Les Echos

10 août 2025

 

Filip Meyer (avec AFP)

 

https://www.lesechos.fr/monde/europe/armenie-azerbaidjan-laccord-qui-annonce-une-nouvelle-donne-geopolitique-au-caucase-2180835

Arménie-Azerbaïdjan : l'accord qui annonce une nouvelle donne géopolitique dans le Caucase

Après des décennies de conflit, l'Arménie et l'Azerbaïdjan ont signé vendredi à Washington un accord de paix lors d'une réunion avec Donald Trump. Les Américains vont prendre le contrôle d'une route clé pour le commerce eurasiatique.

Le président azerbaïdjanais Ilham Aliyev (à gauche), Donald Trump et le Premier ministre arménien Nikol Pashinyan vendredi à la Maison-Blanche.

 

Le président azerbaïdjanais Ilham Aliyev (à gauche), Donald Trump et le Premier ministre arménien Nikol Pashinyan vendredi à la Maison-Blanche. (Photo Reuters)

Une nouvelle donne géopolitique se dessine dans le Caucase du Sud au profit des Etats-Unis. Sous l'égide de Washington, l'Arménie et l'Azerbaïdjan se sont engagés vendredi à la Maison-Blanche à « cesser définitivement » selon Donald Trump, le conflit territorial qui les oppose depuis la fin des années 1980.

Les deux pays ont aussi convenu d'« ouvrir les relations commerciales et diplomatiques et [de] respecter la souveraineté et l'intégralité territoriale » de chacun, a assuré le président américain, qui a signé une « déclaration commune » avec les dirigeants arménien et azerbaïdjanais.

« Nous établissons aujourd'hui la paix dans le Caucase », a commenté le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, qui a également salué la décision de Donald Trump de lever les restrictions pesant depuis plusieurs années sur la coopération militaire de son pays avec les Etats-Unis.

Le Premier ministre arménien, Nikol Pashinyan, a, lui, évoqué une étape qui « ouvrait la voie pour mettre fin à des décennies de conflit ». La nature contraignante ou non de cet engagement n'est toutefois pas claire.

Camouflet pour la Russie

« L'Azerbaïdjan est en position de force et n'a jamais caché attendre de grandes promesses avant de signer un accord », analysait avant la réunion Olesya Vartanyan, experte indépendante en sécurité et en conflit au Caucase du Sud. L'accord conclu vendredi prévoit la création d'une zone de transit passant par l'Arménie et reliant l'Azerbaïdjan à son enclave du Nakhitchevan plus à l'ouest.

Cette zone de transit, qui répond à une revendication de longue date de Bakou, sera nommée « voie Trump pour la paix et la prospérité internationale » (Trump Route for International Peace and Prosperity ou Tripp). Les Etats-Unis y disposeront de droits de développement, ce qui leur permet d'avancer leurs pions dans une région très stratégique et riche en hydrocarbures.

Avant Washington, d'autres puissances comme l'Union européenne ou la Russie avaient tenté de superviser cet accès que l'Azerbaïdjan appelle le corridor de Zanguezour. Particulièrement stratégique, il relierait indirectement la Turquie à l'Asie centrale et pourrait devenir un passage clé du « middle corridor » des routes de la soie chinoise vers l'Europe. Cette présence américaine inédite dans le Caucase du Sud serait également un camouflet pour Moscou et Téhéran, qui s'opposent depuis longtemps à ce corridor.

Question sensible du Haut-Karabakh pas évoquée

« La Russie est occupée par sa guerre en Ukraine et s'est décrédibilisée comme juge de paix après son fiasco dans le Karabakh (2.000 soldats russes devaient protéger l'enclave après la guerre de 2020) et l'Iran, très hostile au corridor, fait face à d'autres défis. Les Etats-Unis ont su se faufiler dans la faille », explique Olesya Vartanyan, experte indépendante en sécurité et en conflit au Caucase du Sud.

L'Iran s'est félicité samedi de « la finalisation du texte de l'accord de paix par les deux pays », tout en exprimant « sa préoccupation quant aux conséquences négatives de toute intervention étrangère, sous quelque forme que ce soit, en particulier à proximité des frontières communes ».

La question toujours très sensible du Haut-Karabakh n'a en revanche guère été évoquée vendredi à la Maison-Blanche. Cette région montagneuse située dans les frontières de l'Azerbaïdjan mais presque exclusivement peuplée d'Arméniens a pourtant été longtemps le coeur de la discorde.

Contrôlée par ces derniers sous la forme de la « République autoproclamée de l'Artsakh » depuis 1994 et une première guerre sanglante, elle a été conquise par Bakou au terme de deux violents conflits en 2020 et en 2023. Le second, précédé d'un blocus de huit mois, qui a créé une grave crise humanitaire dans l'enclave, a conduit à un nettoyage ethnique – ses 100.000 derniers habitants ont fui vers l'Arménie en quelques jours.

A partir de 2024, l'Azerbaïdjan est allé plus loin en exigeant le retrait de la mention du Haut-Karabakh dans la déclaration d'indépendance, un document cité dans le préambule de la Constitution arménienne. Cette modification constitutionnelle, acceptée sur le principe par Erevan, est un processus long et incertain qui implique un référendum.

Un haut responsable américain a assuré à l'AFP que l'Arménie ne sortait pas perdante des tractations, y gagnant « un partenaire commercial stratégique énorme » avec les Etats-Unis.

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Le Monde

9 août 2025

Le Monde avec AFP

https://www.lemonde.fr/international/article/2025/08/09/l-armenie-et-l-azerbaidjan-s-accordent-pour-mettre-fin-a-leur-conflit-sous-l-egide-de-donald-trump_6627564_3210.html

L’Arménie et l’Azerbaïdjan s’accordent pour mettre fin à leur conflit, sous l’égide de Donald Trump
A la Maison Blanche, le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, et le premier ministre arménien, Nikol Pachinian, ont estimé que la médiation du président américain devait lui valoir le prix Nobel de la paix.

Sous l’œil satisfait de Donald Trump, l’Arménie et l’Azerbaïdjan ont signé, à la Maison Blanche, vendredi 8 août, une « déclaration commune » qui acte entre les deux anciennes républiques soviétiques la fin d’un conflit engagé depuis des décennies.
Lire aussi | L’Arménie et l’Azerbaïdjan attendus vendredi à Washington pour signer un accord de paix, annonce Donald Trump

Le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, et le premier ministre arménien, Nikol Pachinian, ont apposé leur signature sur le document au côté de celle du président américain, qui a déclaré que les deux pays du Caucase du Sud s’engageaient « à cesser définitivement tout conflit, à ouvrir les relations commerciales et diplomatiques et à respecter la souveraineté et l’intégralité territoriale » de chacune. La nature contraignante de cet engagement n’est toutefois pas claire.

« Nous établissons aujourd’hui la paix dans le Caucase », a commenté le président azerbaïdjanais, saluant un jour « historique » et remerciant également Donald Trump pour sa décision, annoncée aussi vendredi, de lever les restrictions pesant depuis plusieurs années sur la coopération militaire de son pays avec les Etats-Unis. Le premier ministre arménien a, lui, parlé d’un accord qui « ouvrait la voie pour mettre fin à des décennies de conflit ».
 

« Vous allez avoir une très bonne relation », a lancé le président américain à ses deux invités, ajoutant : « Si ce n’est pas le cas, appelez-moi et j’arrangerai ça. »


Le dossier sensible du Haut-Karabakh peu évoqué

L’accord conclu vendredi prévoit par ailleurs la création d’une zone de transit passant par l’Arménie et reliant l’Azerbaïdjan à son enclave du Nakhitchevan, plus à l’ouest. Cette zone de transit, qui répond à une revendication de longue date de Bakou, sera nommée « Voie Trump pour la paix et la prospérité internationale » (Tripp, selon son acronyme en anglais). Les Etats-Unis y disposeront de droits de développement, ce qui leur permet d’avancer leurs pions dans une région très stratégique et riche en hydrocarbures. Un haut responsable américain a assuré que l’Arménie ne sortait pas perdante des tractations, car elle gagnait un étroit partenariat avec les Etats-Unis.

La question sensible du Haut-Karabakh n’a guère été évoquée vendredi à la Maison Blanche. Cette région est reconnue internationalement comme faisant partie de l’Azerbaïdjan mais a été contrôlée pendant trois décennies par des séparatistes arméniens après une guerre qu’ils avaient remportée lors de la dislocation de l’Union soviétique, et qui avait provoqué l’exode de la quasi-totalité des Azéris qui l’habitait. Bakou a repris partiellement cette enclave lors d’une nouvelle guerre à l’automne 2020, puis entièrement lors d’une offensive éclair en septembre 2023, provoquant à son tour la fuite de plus de 100 000 Arméniens du Karabakh.
Nos explications (2023) | Haut-Karabakh : comprendre ce conflit centenaire qui embrase les relations entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie

Soucieux de dépasser le conflit, Bakou et Erevan s’étaient mis d’accord en mars sur le texte d’un traité de paix. Mais l’Azerbaïdjan, victorieux, exige que l’Arménie modifie sa Constitution pour renoncer officiellement à toute revendication territoriale sur le Haut-Karabakh. Nikol Pachinian s’est déclaré prêt à s’y conformer, annonçant son intention d’organiser un référendum constitutionnel en 2027. Mais le traumatisme de la perte du Haut-Karabakh continue de diviser son pays.

La Turquie, alliée de l’Azerbaïdjan mais qui a récemment amorcé un dégel des relations difficiles qu’elle entretient avec son voisin arménien, a salué, vendredi soir, l’annonce de cet accord. « Nous nous réjouissons des progrès réalisés en vue de l’établissement d’une paix durable entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie », a écrit le ministère des affaires étrangères turc dans un communiqué. En 2020, Ankara avait apporté un soutien militaire décisif à Bakou dans le Haut-Karabakh, permettant la victoire écrasante des troupes azerbaïdjanaises.
Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Arménie-Turquie : la visite du premier ministre arménien à Istanbul marque un pas de plus vers le dégel des relations

La France, où vivent des centaines de milliers de personnes d’origine arménienne, a pour sa part évoqué une « avancée déterminante », négociée « en vue de la normalisation des relations » entre Erevan et Bakou.


« Faiseur de paix »

Lors de cette cérémonie à la Maison Blanche, Ilham Aliev a proposé d’envoyer, avec Nikol Pachinian, une lettre pour soutenir la candidature du président américain au prix Nobel de la paix. « Qui, si ce n’est le président Trump, [le] mérite ? », a-t-il demandé. Le dirigeant arménien a exprimé son soutien à cette idée, en saluant le bilan de « faiseur de paix » de Donald Trump.
 

Donald Trump a plusieurs fois dit publiquement qu’il méritait cette récompense en raison de ses efforts de médiation dans plusieurs conflits internationaux. Les candidatures pour le prix Nobel de la paix 2025 sont closes depuis le 31 janvier et ne sont pas rendues publiques. Israël, le Pakistan et le Cambodge ont annoncé récemment qu’ils nommaient Donald Trump pour cette distinction.
Lire aussi la chronique | Article réservé à nos abonnés « Donald Trump n’a que faire du multilatéralisme, c’est tout seul qu’il chasserait le Nobel au Moyen-Orient »

Le président américain, dont la fascination pour les régimes autoritaires est connue, a demandé à Ilham Aliev depuis combien de temps il était au pouvoir.

« Vingt-deux ans, a répondu le président azerbaïdjanais.

– Cela veut dire qu’il est fort et intelligent », a commenté Donald Trump.

M. Aliev a été élu en février 2024 pour un cinquième mandat, avec 90 % des suffrages, et après un scrutin sans véritable opposition selon les observateurs internationaux.

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Le Grand Continent

10 août 2025

Guillaume Lancereau 

https://legrandcontinent.eu/fr/2025/08/10/trump-poutine-caucase/


En signant un accord de paix entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, Trump a-t-il évincé Poutine du Sud-Caucase ?

Face à l’annonce d’un « deal » de paix à Washington entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan en échange d’un corridor de sécurité qui donne aux États-Unis un accès unique au Caucase du Sud, le Kremlin est resté relativement discret.

Le coup de Trump, qui sert sans doute en interne son récit de « président de la paix », le place-t-il pour autant en position de force face à la Russie de Poutine avant le sommet du 15 août en Alaska ? Il y a tout lieu d’en douter.

Une étude en 7 points sur cette séquence et les réactions dans la région signée Guillaume Lancereau.

Ce 9 août, le président azerbaïdjanais, Ilham Aliyev, et le premier ministre arménien, Nikol Pachinian, ont signé à la Maison-Blanche une déclaration conjointe prévoyant la ratification prochaine d’un traité de paix d’ores et déjà convenu par les deux parties.
 

Le texte de l’accord doit être publié le 11 août et signé, d’après le ministre des Affaires étrangères arménien, après une modification de la Constitution arménienne et l’organisation d’un référendum dans ce pays — puisque les termes de l’accord soulèvent d’importants enjeux de souveraineté.

Cet accord permet à Donald Trump, jouant ici la partition du « médiateur », de se rêver en futur « prix Nobel de la paix » — c’est d’ailleurs en ces termes que l’ont flatté ses deux homologues —, de poser de nouveaux pions dans une région que la Russie considérait comme sa chasse gardée et de montrer, à quelques jours de sa rencontre avec Vladimir Poutine, qu’il aurait une réelle capacité de négociateur.


1 — Mettre fin à un conflit interminable

Cet accord marquerait la fin d’un conflit ouvert depuis la chute de l’URSS et périodiquement ravivé par les décisions politiques et jeux d’alliances des deux voisins.

Une partie de l’Azerbaïdjan, la république autonome du Nakhitchevan, est séparée du reste du pays par le territoire de l’Arménie. À l’inverse, l’enclave du Haut-Karabagh, revendiquée par l’Arménie, se trouve sur le territoire azerbaïdjanais. Cette enclave a fait l’objet des deux guerres du Haut-Karabagh, celle de 1988-1994, qui a replacé la région sous le contrôle de l’Arménie, et celle de la fin de l’année 2000, où l’Azerbaïdjan, soutenu par la Turquie, a repris le contrôle des territoires au terme de six semaines de combats intensifs. 

Cette conquête a été confirmée en septembre 2023, au terme d’une nouvelle offensive azerbaïdjanaise, qui a entraîné la dissolution de la République — pro-arménienne et auto-proclamée — du Haut-Karabagh et le départ forcé de la quasi-intégralité des populations locales vers l’Arménie — dans un mouvement violent et précipité que nombre d’acteurs internationaux ont qualifié de « nettoyage ethnique ».

Les termes exacts de l’accord restent à préciser, mais les deux parties s’accordent désormais sur la nécessité de maintenir la paix et de favoriser les circulations entre la partie principale du territoire azerbaïdjanais et la République autonome du Nakhitchevan par le « corridor de Zanguezour ».

Ce couloir de transport a vocation à relier, par le train et la route, Horadiz en Azerbaïdjan à Ordubad dans le Nakhitchevan, en longeant la frontière Arménie-Iran, pour se poursuivre jusqu’en Turquie.


2 — « L’OTAN veut se glisser entre l’Iran et la Russie comme une vipère »

L’Iran s’est toujours opposé à ce projet de corridor et a tout fait pour l’empêcher de voir le jour.

Ali Akbar Velayati, conseiller du Guide suprême Ali Khamenei pour les Affaires étrangères, a condamné cette initiative dans laquelle la République islamique voit un risque de déstabilisation géopolitique pour l’ensemble de la région, de perte de souveraineté pour l’Arménie et même de possible dislocation du pays. 

Surtout, Téhéran s’est insurgé contre les termes dans lesquels cet accord a été conclu à Washington : le document prévoit en effet de placer le corridor de Zanguezour sous la gestion d’un consortium états-unien pour une durée de 99 ans. Pour la République islamique, ce projet viserait uniquement à affaiblir les relations Russie-Iran et à faciliter le passage potentiel des troupes de l’OTAN — dont fait aussi partie la Turquie, alliée de l’Azerbaïdjan.

Ali Akbar Velayati déclarait à ce propos  : « L’Iran empêchera la création d’un corridor américain dans la région du Caucase. Un tel corridor deviendrait une base pour les mercenaires du président américain Donald Trump » 
 

Si les termes exacts de l’accord restent à préciser, les deux parties s’accordent désormais sur la nécessité de maintenir la paix et de favoriser les circulations entre la partie principale du territoire azerbaïdjanais et la République autonome du Nakhitchevan par le « corridor de Zanguezour ».
 

3 — Les États-Unis s’ancrent dans le Sud-Caucase

Il s’agit d’une victoire personnelle pour Donald Trump, qui n’a pas manqué de le faire savoir en rebaptisant ce corridor : Trump Road for International Peace and Prosperity (TRIPP).

Ainsi conçu, le corridor de Zanguezour permettrait aux États-Unis de s’implanter pour la première fois dans cette partie de l’espace post-soviétique sur laquelle la Russie a toujours entendu conserver une mainmise absolue.

À moyen terme, cette position offrirait aux États-Unis de nouveaux moyens de faire obstacle à la fois aux projets chinois dans la région et aux corridors Russie-Iran-Inde qui figurent au cœur de la stratégie d’avenir russe. 

Comme nous l’avions expliqué dans ces pages, le programme de « sibérisation » prôné par Sergueï Karaganov proposait de « construire de nouveaux corridors méridiens pour relier le sud de la Sibérie à la route maritime du Nord, qui débouche sur la Chine et, à travers elle, vers l’Asie du Sud-Est », tandis que « le pré-Oural et la Sibérie occidentale devaient obtenir un accès vers l’Inde, les pays d’Asie du Sud et le Moyen-Orient ».


4 — La vraie fin de l’URSS ?

L’accord négocié à Washington est un véritable camouflet diplomatique pour la Russie de Poutine qui n’a été ni écoutée, ni même consultée. 

On peut y voir un nouveau symptôme d’une dynamique de fond  : l’autonomisation des pays du Sud-Caucase et l’affaissement de l’influence russe dans la région. 

Trente-cinq ans après la chute de l’URSS, la Russie n’est plus le partenaire unique des pays de la région  : la Turquie joue désormais ce rôle pour l’Azerbaïdjan, l’Arménie et la Géorgie ont renforcé leurs liens avec l’Europe, à plus forte raison encore depuis le début de la guerre en Ukraine.

Au cours des guerres du Haut-Karabagh, la Russie a toujours tâché de maintenir une position de relative extériorité, à dominante pro-arménienne, mais sans intervention directe, appelant au cessez-le-feu et négociant avec les différentes parties, dont l’Azerbaïdjan et la Turquie. 

Lors de la dernière offensive de l’Azerbaïdjan, les contingents russes stationnés dans la région ont ainsi été rappelés en Russie, marquant l’effritement de la capacité d’initiative russe.

L’accord négocié à Washington est un véritable camouflet diplomatique pour la Russie de Poutine qui n’a été ni écoutée, ni même consultée.

En décembre 2024, les relations russo-azerbaïdjanaises ont pris un tournant critique après le crash au Kazakhstan d’un avion de la compagnie AZAL devant effectuer un vol Bakou-Grozny, ciblé par erreur par les systèmes de défense anti-aérienne russe. Cet épisode, qui a coûté la vie à 38 passagers, a été à l’origine d’une crise diplomatique aiguë entre les deux pays, l’Azerbaïdjan exigeant que les responsables soient punis, jusqu’à ce que son président Ilham Aliyev obtienne des excuses personnelles de Vladimir Poutine et l’érection à Moscou d’un monument à son père, Heydar Aliyev — monument effectivement inauguré le 4 mars dernier par le maire de la ville, Sergueï Sobianine.

Quelques mois plus tard, fin juin 2025, des raids de la Garde nationale russe et du FSB dans des appartements d’Iekaterinbourg habités par des Azéris, citoyens de la Fédération de Russie ou de l’Azerbaïdjan, se sont conclus par des dizaines d’arrestations, d’hospitalisations, et même plusieurs décès — sous des accusations de meurtre datant de plus de quinze ans. Les autorités azerbaïdjanaises ont accusé les forces de l’ordre russes d’avoir assassiné leurs ressortissants, avant de lancer, en représailles, des perquisitions dans les locaux de la radio Spoutnik à Bakou et d’y mettre en état d’arrestation deux employés russes accusés de travailler pour le FSB. Les citoyens russes résidant en Azerbaïdjan — notamment depuis l’invasion de l’Ukraine — font l’objet de contrôles de police croissants et sept d’entre eux ont même été arrêtés sous des accusations de trafic de drogue ou de cybercriminalité — leurs passages dans les commissariats locaux ont laissé des traces visibles de violences corporelles.

Il ne faudrait pas pour autant exagérer l’état des relations entre la Russie et les pays du Caucase du Sud  : il ne s’agit pas encore d’une rupture définitive ni d’un conflit ouvert.

La Russie reste l’un des foyers majeurs de la diaspora azérie, arménienne et géorgienne — environ deux millions de personnes selon le dernier recensement russe, sans doute quatre ou cinq millions si l’on y inclut les travailleurs temporaires et les immigrés non déclarés. Le tiers de la population géorgienne et azerbaïdjanaise parle encore le russe  ; davantage encore en Arménie. Par ailleurs, la Russie est engagée dans plusieurs projets de développement de routes et de voies ferrées vers l’Azerbaïdjan, elle dispose d’une base militaire à Gyumri, en Arménie, et ne peut que se réjouir de voir le gouvernement du « Rêve géorgien » adopter une rhétorique anti-occidentale, imposer à sa population des lois répressives inspirées par la législation russe et se rapprocher de Viktor Orbán qui en fait de même en Hongrie.

L’avenir de ces relations reste néanmoins marqué par une profonde incertitude.

C’est d’autant plus vrai à l’heure où, selon le journal roumain G4 Media , la Russie serait en ce moment suspectée par les autorités roumaines d’avoir délibérément contaminé d’importants volumes de pétrole azerbaïdjanais à destination de l’Europe. Une cargaison de 184 000 tonnes de brut aurait ainsi été refusée au port de Constanța. La contamination aurait pu être effectuée par l’injection de citernes de chlore le long du pipeline Bakou-Tbilissi-Ceyhan. Si cette attaque s’avérait confirmée — et si d’autres opérations de ce type venaient à se produire — le conflit Russie-Azerbaïdjan pourrait prendre une tout autre tournure, puisqu’il affecterait directement la sécurité énergétique européenne.


5 — « Le pire scénario possible »

Dans ce contexte, il est logique que l’attitude de la Russie face à l’annonce de l’accord arméno-azerbaïdjanais ait relevé, pour l’essentiel, de la non-réaction.

Pour le Kremlin, le fait que ces deux pays décident de négocier sans la Russie n’est pas une surprise absolue. 

Ilham Aliyev et Nikol Pachinian s’étaient déjà rencontrés à Abou Dhabi en juillet dernier de leur propre initiative, sans médiation d’un pays tiers. Ils avaient ainsi signalé que l’heure n’était plus aux négociations bilatérales sous l’égide de la Russie, comme cela avait encore été le cas en 2020 ou 2021, à l’occasion de discussions sur les questions de transport et de communication.

Surtout, la Russie de Poutine n’a aucun intérêt à s’étendre sur cet échec.

Les journaux télévisés des principales chaînes du pays ont réservé 30 secondes, en conclusion des programmes, à cette question fondamentale, qui concerne directement la géopolitique de la Russie et de ses voisins. En écho au journal pro-Kremlin Komsomolskaïa Pravda, qui titrait « Pachinian a cédé le corridor de Zanguezour contre des garanties de souveraineté », plusieurs blogueurs pro-guerre se sont indignés de l’évincement de Moscou. L’un d’eux qualifiait même la « Route Trump » de « pire scénario possible », annonçant  : « L’Arménie est désormais isolée de l’Iran et les Américains vont inonder l’Azerbaïdjan de leurs armes ».

    La Russie serait en ce moment suspectée par les autorités roumaines d’avoir délibérément contaminé d’importants volumes de pétrole azerbaïdjanais à destination de l’Europe.
    Guillaume Lancereau

6 — À Moscou  : entre silence gêné et menaces 

Du côté des responsables russes, la seule réplique est venue de la porte-parole officielle du ministère des Affaires étrangères, Maria Zakharova.

Sa déclaration s’ouvre sur une reconnaissance très formelle des avancées réelles de cet accord en matière de stabilité et de prospérité pour la région du Caucase du Sud, auxquelles la Fédération de Russie a directement intérêt.

Une deuxième partie du texte souligne le rôle constructif que la Russie dans la normalisation des relations entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, évoquant à l’appui la déclaration tripartite de 2020 sur l’arrêt des hostilités dans le Haut-Karabagh, le déploiement de casques bleus russes dans la région et la définition d’une « feuille de route » économique et diplomatique entre 2020 et 2022. 

Enfin, la communication officielle russe s’est attachée à rappeler que les deux pays semblaient avoir, jusqu’alors, l’intention de mener des négociations bilatérales sans intervention extérieure — ce qui est une manière de critiquer à demi-mot le recours à la médiation états-unienne.

Maria Zakharova souligne surtout que, du point de vue de la Fédération de Russie, l’implication de pays tiers dans les conflits du Sud-Caucase — malgré son absence à Washington, l’Union est explicitement visée — pourrait représenter une nouvelle source de déstabilisation des équilibres de la région  : « La modalité optimale de règlement des enjeux du Caucase du Sud consiste à rechercher puis à mettre en œuvre des solutions choisies par les pays de la région eux-mêmes, avec le soutien de leurs voisins directs  : la Russie, l’Iran, la Turquie. L’implication d’acteurs extérieurs à la région doit contribuer au renforcement des objectifs de paix sans créer de difficultés supplémentaires ni de nouvelles lignes de fracture. Nous aimerions éviter de voir se reproduire la triste expérience de l’intervention occidentale dans le règlement des conflits au Proche-Orient. Pour ce qui concerne le Caucase du Sud, l’un des exemples réside dans la présence, en Arménie, d’une mission d’observation de l’Union européenne, dont les activités irritent constamment les autres acteurs de la région ».


7 — Du Caucase à l’Alaska

À court terme, il faut comprendre cet accord dans la séquence plus large des échanges diplomatiques, parfois houleux, entre les États-Unis et la Russie, où Steve Witkoff, l’envoyé de Donald Trump, vient de rencontrer Vladimir Poutine ce mercredi. 

Il est certain que Donald Trump voit cette victoire en terrain caucasien comme un prélude à son triomphe prochain dans le cadre des négociations relatives à l’Ukraine. 

Rien n’est pourtant moins sûr.

S’il est pour l’heure impossible de prédire le contenu concret des échanges à venir en Alaska, force est de constater que le président états-unien ne dispose pas de nouveaux leviers ou moyens de pression sur Vladimir Poutine, qui vient au contraire d’obtenir un « sommet idéal » — aux conditions qu’il avait toujours recherchées.


Sources :

Joint Declaration signed on meeting between President of Azerbaijan and Prime Minister of Armenia held in Washington.
Иран пообещал препятствовать проекту по созданию коридора для Азербайджана через Армению
Иран пообещал не допустить передачи Зангезурского коридора под управление США
Alexandru Mihaescu, « SURSE Rusia, suspectată că a contaminat intenționat o cantitate mare de petrol azer destinată României și altor țări europene. Țițeiul amestecat cu clorină putea să avarieze grav rafinăria Petrobrazi și să provoace o criză de combustibil în România », G4 Media, 7 août 2025.
Договор Азербайджана и Армении в США : Зангезурский коридор, суть сделки Трампа, Алиева и Пашиняна – KP.RU
Комментарий официального представителя МИД России М.В.Захаровой в связи с переговорами лидеров Азербайджана и Армении в Вашингтоне (США) – Министерство иностранных дел Российской Федерации

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France Culture

11 août 2025

Tigrane Yégavian

Que contient l’accord de paix signé entre l'Arménie et l’Azerbaïdjan ?

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/la-question-du-jour/que-contient-l-accord-de-paix-signe-entre-l-armenie-et-l-azerbaidjan-3377983

Les dirigeants d'Arménie et d'Azerbaïdjan vont signer vendredi un accord de paix "historique", sous l'égide des États-Unis. L'enjeu ? Mettre fin au conflit territorial qui oppose ces deux anciennes républiques soviétiques depuis des décennies, selon Donald Trump.

Avec

  • Tigrane Yegavian, professeur de relations internationales à l’Institut Schiller, membre du comité de rédaction de la revue Conflit.

Le vendredi 8 août, l’Arménie et l’Azerbaïdjan ont signé un accord à Washington sous l’égide de Donald Trump, qui a qualifié l’accord d’”historique”. “Beaucoup de dirigeants ont tenté de mettre fin à la guerre, sans succès, jusqu’à maintenant, grâce à TRUMP”, s’est vanté le président américain, avant la signature, sur son réseau Truth Social. L’accord de paix vise à normaliser les relations entre les deux États, en conflit quasi-permanent depuis 1989, mais il permet aussi aux États-Unis de renforcer leur influence dans le Caucase, région historiquement tributaire de la Russie et de l’Iran.

Un pas significatif

Pourtant, il ne s'agit pas d'un accord de paix au sens littéral, comme l'explique Tigrane Yegavian, professeur de relations internationales à l’Institut Schiller : "Il s'agit d'un préaccord, en fait, une sorte de mémorandum d'accord dans lequel les deux parties se sont accordées sur peu en point, mais il est loin d'être ratifié. Donc, c'est effectivement un pas significatif vers un rapprochement des vues entre les armées azerbaïdjanais, mais encore très loin d'une finalisation."

Enjeux économiques

L’accord prévoit la mise en place d’un corridor reliant l’Azerbaïdjan à son exclave du Nakhitchevan, surnommé le corridor de Zanguezour : "C'est un grand projet d'infrastructure. Ça fait très longtemps que les Azerbaïdjanais essayent d'avoir la main sur cette voie de communication géostratégique qui la relierait à son territoire à l'ouest, Nakhitchevan, qui lui-même est frontalié à la Turquie, ce qui est perçu par les Arméniens comme une menace d'étouffement total, parce qu'il y a la frontière avec l'Iran auquel ils y tiennent énormément. Il y aura encore un contrôle souverain de l'Arménie, mais les contours de cette souveraineté restent extrêmement flous puisque l'Arménie a accepté de déléguer sa souveraineté ou de partager sa souveraineté avec une compagnie américaine privée. Beaucoup d'investissements sont en jeu. On parle de sommes d'argent très importantes pour assurer la construction d'une voie routière, une voie ferroviaire, éventuellement aussi le passage des ressources, en tout cas des gazoducs, en provenance d'Azerbaïdjan."

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Opinion International

11 août 2025

Michel Taube

https://www.opinion-internationale.com/2025/08/11/la-paix-entre-larmenie-et-lazerbaidjan-bientot-le-prix-nobel-pour-trump-ledito-de-michel-taube_137264.html

La paix entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan : bientôt le prix Nobel pour Trump ?

L’édito de Michel Taube

Et Trump récidiva en obtenant un accord historique sur un dossier inextricable et négocié dans le plus secret ! Après les Accords d’Abraham, la paix du Caucase !

L’accord signé hier à Washington entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan marque un tournant majeur dans l’histoire tourmentée du Caucase. Sous l’égide de Donald Trump, les deux pays se sont engagés à instaurer une paix permanente, à rouvrir leurs frontières au commerce, aux voyages et aux relations diplomatiques, et à respecter mutuellement leur souveraineté et leur intégrité territoriale. Pour Washington, c’est aussi l’occasion d’avancer ses pions dans une région stratégique, longtemps laissée aux seules influences russe et turque.

La question brûlante du Haut-Karabakh (ou de l’Artsakh pour les Arméniens), envahi par l’Azerbaïdjan il y a deux ans, trouve ici un début de réponse. L’enclave arménienne restera sous contrôle de Bakou, dans un cadre de garanties internationales de sécurité et de respect des minorités. Après trente ans de conflits sanglants et deux guerres récentes, c’est peut-être enfin la promesse d’un avenir apaisé pour cette terre meurtrie.

Aux côtés de Trump à la Maison Blanche, le président azerbaïdjanais Ilham Aliev et le Premier ministre arménien Nikol Pachinian ont estimé que la médiation du président américain, notoirement sensible aux honneurs et distinctions, devait lui valoir le prix Nobel de la paix.

Car c’est une victoire éclatante pour Donald Trump, qui s’affiche désormais en faiseur de paix. Le président américain, déjà auréolé de la signature des accords d’Abraham en 2020, compte bien transformer cet exploit diplomatique en trophée suprême : le prix Nobel de la paix, décerné le 10 octobre prochain. Pendant que l’Europe se contentait de commenter de loin, incapable de peser réellement dans cette réconciliation historique, Trump prouve que l’efficacité prime sur les postures. Et qu’aux yeux des chrétiens d’Orient, il agit plus concrètement que les donneurs de leçons français ou européens.

L’Azerbaïdjan, puissance pétrolière prospère et stratégiquement située, a su, malgré un régime autoritaire, contenir l’islamisme radical et promouvoir un islam modéré, tout en cultivant des relations étroites avec Israël. Avec ce conflit désormais réglé, il est temps que la France et l’Europe comprennent qu’un partenariat renforcé avec Bakou est non seulement souhaitable mais indispensable, pour la stabilité régionale comme pour leurs intérêts économiques.

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photo : Maria Zakharova

Par Сурен — Travail personnel, CC BY 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=126556031

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