L’Etat contre le territoire mythifié
Avec « l’Arménie réelle », le gouvernement prend acte de la faiblesse du pays après sa défaite écrasante dans la guerre de 2020 et la chute du Haut-Karabakh, trois ans plus tard. « C’est une réévaluation douloureuse, la fin de l’arrogance qui prévalait avant 2020, et la reconnaissance de la nouvelle réalité de l’Arménie". Que cela plaise ou non à la diaspora, il s’agit de se concentrer sur l’Etat arménien tel qu’il existe aujourd’hui. »
Ce faisant, le premier ministre choisit l’Etat contre le territoire mythifié, la nation civique contre la nation ethnique, au risque de hérisser l’Eglise – qu’il perçoit comme un obstacle à son projet – , la diaspora, et une partie des citoyens d’Arménie. Cette rupture passe aussi par les symboles. Depuis 2023, Nikol Pachinian envisage de changer les armoiries nationales, dont il estime qu’elles n’ont « rien à voir avec l’Arménie contemporaine », et fait valoir que le mont Ararat, le symbole le plus fort et sacré pour les Arméniens, n’est pas sur son territoire reconnu internationalement, mais en Turquie depuis 1923. (la lune est bien sur le drapeau turc, ndlr)
Pour le chef du gouvernement, renoncer aux territoires perdus et normaliser les relations avec l’Azerbaïdjan et la Turquie sont la meilleure manière d’éviter de nouvelles guerres, quitte à multiplier les concessions. Selon lui, il en va de la survie du pays, très affaibli, enclavé entre ses ennemis historiques, et dont la protection n’est plus garantie par son alliée traditionnelle, la Russie, accaparée par la guerre en Ukraine. Un pas important a été franchi le 13 mars avec l’annonce d’un accord de paix avec l’Azerbaïdjan, mais sa signature se fait attendre, Bakou multipliant les exigences préalables….
sources : JP D., Le Monde