1 Nouvel Hay Magazine

France-Culture : Chouchi

RETOURNONS SUR FRANCE CULTURE

 

Emission « Villes divisées »

Chouchi, forteresse disputée – Ép. 4/4 – Villes divisées
 
   
 

Chouchi, forteresse disputée – Ép. 4/4 – Villes divisées

La ville de Chouchi ou Choucha, est la frontière entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan et revêt une grande importance…

 
 

 

 

 

Chouchi, ou Choucha, est disputée par l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Elle a une importance symbolique au niveau culturel comme religieux pour les deux pays. Depuis sept mois elle a été reprise par l’Azerbaïdjan. Comment les deux camps utilisent-ils l’histoire pour démontrer leur droit à cette ville ?

source : Catherine POunardjian / AEP

Chouchi (en arménien : Շուշի) ou Choucha (en azéri : Şuşa)1 est une ville de la République du Haut-Karabagh2. À partir de 1992, la quasi-totalité de la population est arménienne, les populations azéries ayant fui la région durant la guerre du Haut-Karabagh. La ville de Chouchi comptait 4 446 habitants3 en 2015.

Elle repasse officiellement sous le contrôle de l'Azerbaïdjan dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu sur le Haut-Karabakh du 10 novembre 20204.

Sommaire

Géographie

Chouchi est située au centre du Haut-Karabagh, à une quarantaine de km de la frontière avec l'Arménie. Elle est perchée à une altitude comprise entre 1 400 et 1 800 mètres.

Histoire

Forteresse de Chouchi.

Les premières mentions de la ville apparaissent au Moyen Âge. La ville et la forteresse de Chouchi sont ensuite mentionnées en tant qu'élément important d'un des districts militaires d'Arménie orientale qui joue un rôle clef dans la campagne du commandant arménien Avan Yuzbashi, soutien de David Bek, contre les forces ottomanes ayant envahi le Caucase du Sud dans les années 1720-17305. Situées dans le mélikat arménien de Varanda, elles sont ainsi mentionnées en 1725 dans un rapport de Kehva Chelebi, chargé de la correspondance entre les méliks du Karabagh et les autorités russes6. La forteresse entre ensuite à la fin des années 1760 en possession de Panah Ali Khan7, fondateur du khanat du Karabagh, peut-être par tromperie8.

Selon une autre version, défendue par des historiens azerbaïdjanais, la ville est fondée en 1750 par Panah Ali Khan9.

La période qui suit est marquée par des conflits répétés avec la Perse voisine.

Au xixe siècle, l'influence russe sur le Caucase ne cesse de grandir et, en 1805, le Karabagh est intégré à l'Empire russe. Durant la guerre russo-persane de 1826-1828, la citadelle de Chouchi résiste durant plusieurs mois sans jamais être prise. Par la suite, la ville ne cesse de croître grâce aux vagues successives d'immigration, notamment d'Arméniens quittant la Perse.

En 1830, la ville est divisée en deux parties. Les quartiers de l'est de la ville sont habités par les populations turcophones tandis que les Arméniens peuplent les quartiers ouest, plus en hauteur.

La ville après les pogroms anti-arméniens

Les premières tensions entre les deux ethnies ont lieu au début du xxe siècle. La population arménienne n'a cessé de croître au xixe siècle et toute la région est en proie à des tensions entre les populations musulmanes et arméniennes. De plus, en périphérie de la Russie, ce début de siècle est marqué, outre la révolution bolchévique, par la recherche d'autonomies territoriale et culturelle et le Caucase n'y échappe pas. Le , les premières tensions entre les deux ethnies éclatent et des centaines de personnes sont tuées et plus de 200 maisons brulées ; ces violences s'inscrivent dans le cadre des massacres arméno-tatars de 1905-1907.

À la fin de la Première Guerre mondiale, après la chute de l'Empire ottoman, le Karabagh est occupé par les troupes britanniques. Son commandement désigne l'Azerbaïdjan pour gouverner le Karabagh. Son Conseil accepte de coopérer avec Bakou en attendant que le sort de la région soit réglé par la conférence de paix de Paris.

Mais à l'été 1919, la tension monte et 700 chrétiens de la ville sont massacrés par les Tatars. La tension culmine avec la révolte arménienne fortement réprimée par l'armée azerbaïdjanaise. La situation s'envenime et plus de 20 000 Arméniens sont massacrés durant le pogrom de mars 1920.

Monument à la prise de la ville par les Arméniens.

Peu de temps après, l'Armée rouge envahit l'Azerbaïdjan puis l'Arménie. En 1923, malgré les promesses bolchéviques faites aux Arméniens, le Haut-Karabagh devient une région autonome au sein de la nouvelle RSS d'Azerbaïdjan. Après les pogroms de 1920, Chouchi n'est plus qu'une petite ville de 5 000 habitants et laisse le titre de capitale de région à la ville voisine de Stepanakert.

La ville reste en ruines jusque dans les années 1960 où l'on remarque son potentiel touristique. Dans les années 1970, les touristes viennent de toute l'Union soviétique se reposer à Chouchi et profiter des paysages montagneux de toute la région.

Avec la guerre et la prise de la ville par les Arméniens le , des quartiers entiers ont été ravagés et restent aujourd'hui encore en ruines.

Lors de la guerre de 2020 au Haut-Karabagh, des frappes aériennes azéries contre la ville de Chouchi le 8 octobre font plusieurs blessés et causent des dégâts importants à la cathédrale10. Lors d'une allocution télévisée, le président azerbaïdjanais annonce le 8 novembre 202011 avoir repris la ville12.

Population

Recensements (*) ou estimations de la population13,14 :

Évolution démographique
1897 1923 1926 1939 1959
25 881 6 976 5 107 5 424 6 117
Évolution démographique, suite (1)
1970 1979 1989 2002 2005
8 693 11 729 15 039 3 000 3 191
Évolution démographique, suite (2)
2007 2008 2009 2010 2011
3 320 3 429 3 599 3 880 4 136
Évolution démographique, suite (3)
2013
4 300