REGARD SUR LE DESTIN DES JUIFS ET DES ARMÉNIENS ET LE PRINTEMPS ARABE
Héritiers d’une l’histoire millénaire, Arméniens et Juifs ont eu des destins similaires. Les Juifs, peuple errant sans patrie, vivaient éparpillés aux quatre coins du monde. Grâce à leur langue et leur religion, les Juifs ont su préserver leurs coutumes ancestrales et conserver leur identité dans les pays où ils s’étaient installés. Pendant 20 siècles, ils ont réussi à s’intégrer dans les sociétés de ces pays. Par leur solidarité et leur ténacité dans le travail, les Juifs ont pu construire un État indépendant. Victime de la Shoah lors de la seconde guerre mondiale (1939-1945), le peuple juif put retrouver un berceau ancestral autour de Jérusalem avec la création de l’Etat d’Israël le 14 mai 1948. Après l’horreur vécue, ce peuple a transformé le désert en prairie. Israël compte sur la diaspora juive, intégrée dans différents secteurs de la société.
Aujourd’hui, à l’échelle internationale, Israël est devenu un pays incontournable. Il a une avance considérable dans le domaine économique, culturel mais également militaire, disposant semble-t-il de l’arme atomique. Entouré par des États arabes et la Palestine qui lui sont hostiles, Israël a choisi d’implanter des colonies pour mieux renforcer ses frontières.
L’administration américaine qu’elle soit démocrate ou républicaine se targue de soutenir sans réserve Israël. Mais l’Amérique poursuit son propre intérêt en appuyant l’armée israélienne. Selon un accord signé, il y a peu, entre Jérusalem et Washington, les États-Unis s’engageraient à octroyer une aide de plus de 37 milliards de dollars, échelonnée sur 10 ans, afin de moderniser l’armée israélienne. De ce fait, Israël ne serait-il pas de plus en plus exposé par les États-Unis ?
Les Occidentaux et les États-Unis ont voulu chasser les dictateurs des États méditerranéens. Une Révolution dite du « Printemps Arabe » fut déclenchée d’abord en Tunisie puis en Libye où les forces de l’OTAN sont intervenues par des bombardements sur les sites stratégiques du pays. Le président Kadhafi fut exécuté. La tempête de ce Printemps Arabe a touché l’Egypte. Le président Moubarak fut destitué, mais les intégristes musulmans ont refait surface. Vint le tour de la Syrie où la situation catastrophique du pays est le symbole vivant des désordres créés par ce « Printemps Arabe ». Les commanditaires de ces actions ne se sont pas intéressés aux dictateurs des États arabes du Golfe qui financent et fournissent régulièrement leurs soutiens aux rebelles, assassinent les peuples voisins qui vivent paisiblement sur leurs terres. Le Printemps Arabe est devenu « L’Hiver et la Crise Arabe ». Qui a profité de cette situation ? C’est l’industrie de l’armement qui, partout dans le monde a ramassé la mise, semant la destruction et la mort de plusieurs milliers de personnes.
Quant aux Arméniens, ce peuple fut spolié de ses biens et persécuté sur ses terres natales, qui constituaient « l’Arménie Historique ». Les premiers grands massacres des Arméniens ont été commis par les Turcs ottomans en 1894. C’est le 24 avril 1915, que ces massacres prirent un caractère génocidaire avec l’annihilation totale de tout un peuple. Amputée physiquement et territorialement, la nation arménienne ne conquit son indépendance que le 21 septembre 1991.
Auparavant le pays avait connu plusieurs gouvernances. La troisième République d’Arménie fut créée après la dislocation de l’URSS. Elle a fêté le 25ème anniversaire de sa création le 21 septembre 2016. À cette occasion, un défilé militaire a attiré l’attention des représentants diplomatiques des pays invités avec notamment la présentation des missiles russes « Iskander-M » d’une portée de 300 à 500 Km et avec une précision de tir incontestable. Il est bien évident que la Russie n’a pas fourni ce matériel aux Arméniens sans une arrière-pensée. La Russie n’a-t-elle pas besoin de l’Arménie pour assurer la sécurité dans le Caucase tout en préservant la sienne ? Certes, un million d’Arméniens travaillent et vivent en Russie. Mais combien de représentants arméniens sont élus à la Douma pour exercer une quelconque influence dans les décisions gouvernementales ? L’Arménie serait-elle considérée dans le monde comme le gardien du Caucase ainsi que le principal bouclier de la défense de frontière de la Russie ?
Depuis presque 100 ans, Les Arméniens de la diaspora se sont recroquevillés dans leur coquille arménoarménienne. Que font-ils dans les pays où ils vivent ?
La communauté arménienne de France, qui représente plus de 500 000 âmes, n’a qu’un seul représentant à l’Assemblée Nationale. Arrivés 50 ans après les Arméniens en Europe, les Turcs ont actuellement 33 représentants au Bundestag. Ils ont voté dernièrement à l’unanimité avec leurs collègues allemands la reconnaissance du « Génocide des Arméniens de 1915 ».
Le destin des Arméniens et des Juifs se déroule certes sur les deux lignes parallèles, mais une de ces lignes est plus épaisse que l’autre. Les Arméniens pourront-ils étoffer la leur pour se faire respecter ? Là est la question.
L’Arménie deviendra un pays fort lorsqu’elle disposera d’une diaspora organisée, unie et forte dans chaque pays du monde où vivent des Arméniens. Si les Arméniens ne disposent pas de pétrole, leur intelligence et la subtilité diplomatique peuvent prendre le pas sur l’absence de pétrole. Cette allusion concerne tout aussi bien les Arméniens de la diaspora que les citoyens d’Arménie et d’Artsakh. Agissons ensemble pour un avenir meilleur.
Nersès Durman-Arabyan Paris 10/10/2016
